Le retour du Ténia
Situation sanitaire mars/avril 2021
Avec le retour du printemps et la mise à l’herbe des agneaux, nous constatons ces dernières semaines celui du ténia. Au laboratoire, l’incidence des analyses coproscopiques positives pour ce parasite augmente. Et à l’autopsie, il commence à être identifié comme cause possible de la mort ou ayant pu entraîner une entérotoxine fatale.
Cf Bulletin de l'Alliance Pastorale N°920 Avril 2021
Mener l’enquête
L’augmentation des cas d’entérotoxémie sur des agneaux au pâturage est l’un des signes qui doit faire penser à un parasitisme par le ténia. Des troubles digestifs avec constipation ou diarrhée, un mauvais état général avec déficit de croissance, amaigrissement et une laine sèche et cassante, ou un manque de vigueur des agneaux, avec une anémie possible, sont les autres symptômes qui doivent alerter. Il faut toujours se souvenir que le ténia est le premier parasite digestif qui pose problème sur les agneaux d’herbe au printemps.
Pour confirmer cette suspicion, on recherche alors les traces d’anneaux de ténia dans les fèces : ils prennent la forme de cordons plats et blancs (photo), puis de grains de riz lorsqu’ils se dessèchent. 5 à 6 prélèvements individuels de crottes et un envoi au laboratoire permettent également de confirmer rapidement la suspicion.
Vie et œuvre du ténia
Les agneaux se contaminent dès les premiers brins d’herbe ingérés, en avalant un acarien, l’oribate, qui est l’hôte intermédiaire du ténia. Cet oribate pullule sur les pâtures (jusqu’à 25000 par m²), où sa longévité peut atteindre 18 mois. Il résiste très bien aux conditions hivernales. Il est donc présent dès la mise à l’herbe et les agneaux en ingèrent rapidement des centaines, dont certains sont porteurs de larves infestantes de ténia.
Ces larves vont se fixer dans l’intestin grêle de l’agneau et se développer en ténia adulte. Les premiers signes cliniques peuvent apparaître sur les agneaux dès 5 à 6 semaines après la mise à l’herbe. Ces signes sont liés au détournement alimentaire occasionné par les ténias, aux toxines qu’ils libèrent et à la gêne mécanique qu’ils occasionnent lorsqu’ils sont présents en grand nombre dans le tube digestif des agneaux.
Action, réaction !
Le traitement se fait par administration orale d’un antiparasitaire. Celui-ci peut être spécifique du ténia ou polyvalent ténia-strongles, mais n’est jamais rémanent. L’administration doit donc être faite à partir de 5 semaines après la sortie à l’herbe ou le début de la consommation effective d’herbe. Et le renouvellement du traitement, 5-6 semaines après la première administration, peut être nécessaire.
Attention, il faut bien prendre l’avis de son vétérinaire sur le dosage adapté. En effet, selon le médicament utilisé et les signes importants ou non de parasitisme, la dose à administrer doit souvent être adaptée. De plus, il convient, encore plus que pour les autres parasitismes, de ne pas sous-doser. Il faut donc se baser sur le poids des agneaux les plus lourds du lot pour définir la quantité de produit à administrer et correctement vérifier le réglage du pistolet drogueur ; ne pas oublier également de bien secouer le bidon avant utilisation pour homogénéiser la suspension.
Enfin, aucun traitement n’étant ovicide, laisser ensuite les agneaux 12 heures en bergerie ou sur leur ancienne pâture avant de les changer de parcelle.
Pour limiter les contaminations, on sortira si possible les agneaux des pâtures neuves ayant été labourées et on évitera le surpâturage. L’immunité contre le ténia se développe en quelques mois. Ce ne sera donc plus un souci clinique sur les agnelles après 6 mois de pâturage et sur les brebis.
Par Laurent Saboureau - Dr Vétérinaire
