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L’emploi féminin en agriculture : Une présence essentielle, une reconnaissance perfectible

La CCMSA a présenté ses chiffres concernant l’emploi féminin en agriculture. En 2019, la population active non-salariée agricole féminine  représentent 27,1 % des non-salariés agricoles et presque un quart des chefs proportion stable depuis plus de dix ans.


Si les femmes représentent 26 % de l’effectif des chefs d’exploitation, elles ne sont en revanche que de 5,2 % à diriger des entreprises agricoles, soit une baisse de 0,5 point sur un an.

Elles sont relativement plus âgées que leurs homologues masculins.  Parmi elles, 20,7 % ont plus de 60 ans (12 % chez les hommes).


Une femme sur dix est devenue cheffe lorsque son conjoint est parti à la retraite

Lorsque l’agriculteur fait valoir ses droits à la retraite, il lui est possible de transmettre son exploitation ou entreprise à son conjoint, qui la dirige alors jusqu’à sa propre retraite. Dans 87,8 % des cas, cette transmission - dite « transfert entre époux » - s’effectue de l’homme vers la femme. 

Le phénomène du transfert entre époux était très important dans les années 2000. La réforme des régimes de retraite intervenue en 2010 qui faisait passer de 60 à 62 ans l’âge légal de départ en retraite, a conduit les chefs à prendre leur retraite de plus en plus tardivement et contribué à réduire très fortement la pratique du transfert entre époux. Les départs ne sont plus compensés par autant de transferts entre époux. En conséquence, sur la décennie 2009-2019, l’effectif de cheffes a diminué de 13,4 % tandis que celui de leurs homologues masculins baissait de 12,3 % sur la même période.

Les femmes dirigent 29,5 % des exploitations ou des entreprises agricoles

En 2019, 29,5 % des exploitations et des entreprises agricoles sont exploitées ou co-exploitées par au moins une femme ; proportion stable par rapport à l’année précédente. Dans 16,7 % des cas, les exploitations ou entreprises agricoles sont exclusivement dirigées par des femmes. Lorsqu’elles sont associées à des dirigeants masculins, les femmes co-dirigent des structures de forme sociétaire, comme le GAEC (Groupement agricole d’exploitation en commun) ou l’EARL (entreprise agricole à responsabilité limitée). En revanche, lorsqu’elles sont seules, les femmes privilégient la forme juridique en nom personnel dans 68,5 % des cas. 


Les femmes sont très présentes dans l’agriculture traditionnelle et surreprésentées dans les filières d’élevage porcin et avicole

En termes d’effectifs, les cheffes d’exploitation exercent principalement leur activité - tout comme leurs homologues masculins - dans les secteurs composant l’agriculture traditionnelle : les cultures céréalières et industrielles (16,4 %), le secteur de l’élevage de bovins-lait (15,6 %), les cultures et élevages non spécialisés (12,7 %) et la viticulture (12 %). Cette répartition est le reflet du poids de chaque filière dans le paysage agricole français.

La part des femmes est proportionnellement très importante dans l’élevage de chevaux (48,6 %), l’entraînement, dressage, haras, clubs hippiques (48,5 %), l’élevage de gros animaux (47,4 %), l’aviculture et la cuniculiculture (34 %). En revanche, leur présence est limitée dans les exploitations de bois, les entreprises paysagistes, les scieries fixes et un peu moins dans la sylviculture et les entreprises de travaux agricoles.

Le statut de collaboratrice d’exploitation ne séduit plus les jeunes générations

En dix ans, l’effectif des collaboratrices d’exploitation a été divisé par deux, traduisant le désintérêt pour ce statut par les jeunes générations. Lorsqu’elles choisissent de rester sur l’exploitation pour y travailler, les femmes préfèrent opter pour un statut de co-exploitant.

Elles aussi sont principalement présentes dans les segments de l’agriculture traditionnelle comme le secteur céréalier, l’élevage laitier, la polyculture associée à de l’élevage, l’élevage de bovins pour la viande ou la viticulture.

Âgées de 53,6 ans en moyenne, les collaboratrices d’exploitation exercent le plus souvent leur activité dans une exploitation en nom personnel mettant en valeur une superficie moyenne de 63 hectares, contre une superficie moyenne de 40 hectares pour leurs homologues masculins.

373 700 femmes salariées dans la production agricole

Le secteur de la production agricole emploie 373 700 femmes, un effectif en très légère hausse de 0,2 % par rapport à 2018 et en recul de 6,6 % depuis 10 ans. Elles représentent 35,4 % des salariés du secteur.

Des conditions d’emploi plus précaires

Le recours au contrat à durée déterminée (CDD) occupe une place prépondérante dans l’emploi féminin de la production agricole. Ainsi, 81,9 % des salariées du secteur détiennent un CDD.

Certaines filières agricoles recourent de manière conséquente au travail saisonnier des femmes ; c’est le cas plus particulièrement de la viticulture, des cultures spécialisées ou des entreprises de travaux agricoles. Les CDD y représentent 79 % à près de 86 % des contrats proposés aux femmes et celles-ci représentent 36,5 % des salariés saisonniers.

Sur le marché du travail agricole, les femmes ont des conditions d’emploi plus précaires que celles des hommes. En CDD, la durée moyenne d’un contrat féminin est inférieure de 12,8 % à celle d’un contrat masculin. En CDI, les femmes ont des temps de travail inférieurs à ceux des hommes (12,2 % en moyenne). Enfin, elles sont proportionnellement deux fois plus nombreuses à temps partiel que les hommes.

Environ 132 200 femmes d’exploitants n’ont pas le statut de non-salarié agricole mais sont néanmoins indispensables

Salariées dans l’entreprise de leur conjoint ou dans une autre entreprise (agricole ou non), elles assurent un complément de revenu au ménage, ce qui contribue indirectement au maintien de l’exploitation. Leur participation à la gestion des exploitations n’est pas directement mesurable, mais réelle : lorsqu’elles sont interrogées lors du recensement agricole, elles déclarent majoritairement aider à la gestion de l’exploitation, bien que n’ayant pas le statut de collaboratrice. 


MATERNITE

Hausse du recours à l’allocation de remplacement et aux indemnités journalières forfaitaires

Pendant leur maternité et sous certaines conditions, les non-salariées agricoles peuvent bénéficier d’une allocation de remplacement permettant la prise en charge des frais occasionnés par leur remplacement dans les travaux agricoles. Cette allocation répond au besoin des exploitantes agricoles : elle permet la continuité de l’activité agricole et est une garantie de pérennité des exploitations. En 2019, ce sont ainsi 1 100 non-salariées agricoles qui ont fait appel à un remplaçant.

Depuis 2019, elles peuvent bénéficier directement d’indemnités journalières forfaitaires lorsqu’elles n’ont pas la possibilité d’avoir recours à un service de remplacement. Cette option n’a attiré que 38 exploitantes.

Pour les femmes ayant accouché en 2019, le recours à l’un de ces deux dispositifs d’indemnisation n’a été que de 59 % (taux légèrement supérieur à celui de 2018 (56 %)). 


SANTE

Les femmes relevant du régime agricole sont globalement en meilleure santé que l’ensemble des femmes ayant le même âge

Ainsi, elles souffrent moins souvent de maladies chroniques comme le diabète et sont moins souvent affectées par un cancer. Elles souffrent moins d’insuffisance rénale chronique, de maladies respiratoires chroniques ou encore de maladies psychiatriques, dégénératives ou neurologiques. Un moindre risque de maladies psychiatriques est constaté particulièrement chez les non-salariées agricoles. Ce risque d’autant plus modéré dans le cas des troubles névrotiques, des troubles addictifs et de la déficience mentale.


Lorsqu’un sur-risque (ou un sous-risque) est constaté au sein de la population des femmes agricoles, la tendance est encore plus marquée chez les exploitantes. Le diabète fait exception avec un sous-risque calculé chez les femmes exploitantes agricoles (- 12 %) alors que les salariées agricoles ont un sur-risque par rapport aux femmes de l’ensemble des régimes (+ 8 %).

En revanche, les femmes affiliées au régime agricole présentent un sur-risque de pathologie cardio-neurovasculaire chronique ou aiguë. Ce risque est plus élevé de 10 % pour ces femmes par rapport à la population féminine des autres régimes. Elles ont également un risque plus élevé d’être affectées par des maladies coronariennes alors qu’un sous-risque est observé pour l’ensemble du régime agricole.


AIDE SOCIALE

Un peu plus d’un allocataire de la prime d’activité sur cinq est une femme au régime des non-salariés agricoles.

En décembre 2019, elles sont à 22,9 % allocataires de la prime d’activité. Cette proportion est stable en un an. En raison des mesures d’urgence économique et sociale prises par l’Etat pour favoriser l’emploi, l’effectif des allocataires de la prime d’activité progresse fortement en 2019 par rapport à 2018. Cette hausse reste toutefois plus modérée pour les femmes non-salariés (22,7 %) que pour les hommes (23,8 %).

L’âge moyen des femmes allocataires est de 43,4 ans (stable par rapport à 2018) contre 44,8 ans pour les hommes (stable par rapport à 2018). 

Les couples avec enfant(s) constituent le modèle de famille prédominant  chez les bénéficiaires de la prime d’activité. Les femmes seules avec enfant sont moins représentées. 

RETRAITE

Des disparités de pensions selon le genre et les statuts juridiques

Fin 2019 en France métropolitaine, les femmes sont majoritaires au régime des non-salariés agricoles (NSA) avec plus de 56 % de l’effectif. Elles sont près de 734 000 sur le territoire.

Parmi ce nombre, plus de 284 000 ont été cheffes d’exploitation ou d’entreprise agricole, 248 000 ont gardé le statut de conjointe et près de 111 000 n’ont connu que celui d’aide familiale. Pour les autres, elles n’ont eu aucune activité dans le régime mais perçoivent, de par leurs conjoints décédés, une pension de retraite de réversion agricole.

Malgré leur nombre, le montant de leur retraite reste à un niveau inférieur à celles de leurs homologues masculins.

Ainsi, pour celles ayant opté pour le statut de cheffe, la pension non-salariée agricole est inférieure en moyenne de 3,15 % (correspondant à 21€/mois brut). Cet écart s’explique en partie par la durée en qualité de cheffe : en effet, les femmes l’ont été en moyenne durant 48 trimestres contre 97 pour les hommes. Cette disparité se traduit par conséquent en termes de montant, ce statut étant le plus rémunérateur.

En incluant l’ensemble des pensions servies par les régimes professionnels traversés durant la vie active et des droits indirects tels la réversion, l’écart atteint près de 13,2 % (soit 170€/mois brut) en leur défaveur, les femmes disposant en moyenne de 1 118€/mois brut. Ce différentiel de pension n’est donc pas propre au régime des non-salariés agricoles. 

Les explications sont multi-factorielles2 (carrières plus fréquemment incomplètes, rémunération moins élevées) et concernent l’ensemble des régimes de retraite. D’après l’IInsee, les pensions de droits directs (i.e. associées à la carrière professionnelle) des femmes en France sont inférieures de 42 % en moyenne en 2014. Pour celles bénéficiant de la pension de réversion (22,5 % des retraitées en 2014), l’écart se réduit à 26 % avec les hommes.

Les femmes ayant conservé le statut de conjointe collaboratrice souffrent d’un écart plus conséquent. Quelle que soit leur durée de carrière, le différentiel de pension atteint 19,5 %. Leur pension globale, incluant l’ensemble de leurs retraites (droits directs et dérivés), s’élève à 1 063€/mois brut contre 1 321€/mois brut pour les hommes ayant opté pour ce même statut. Les raisons tiennent essentiellement au nombre de trimestres en qualité de conjointe (en moyenne de 95) tandis que les hommes en comptabilisent 53. Ce statut étant peu contributif, la pension servie est plus modeste.

Concernant les femmes anciennement salariées agricoles, la différence est aussi marquée. Le différentiel de pension femmes/hommes atteint 17,4 %. Leur pension globale, tous régimes et droits, s’élève en moyenne à 1 448€/mois brut. Ce montant est 300€/mois inférieur à celui de la gente masculine. La durée de carrière en tant que salariée n’explique pas cet écart dans la mesure où les hommes bénéficient seulement de six trimestres supplémentaires. 

En réalité, les motifs sont variés et partagés par la totalité des régimes de pension français et étrangers, comme évoqué précédemment.(2)


(2) - Dossier Insee Références « Femmes et hommes, l’égalité en question », édition 2017, 201 pages.
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