Les femmes dans le monde agricole
Un agriculteur sur trois est une agricultrice.
Mais on parle et montre peu les femmes du monde de l’agriculture.
Forte de ce constat, la MSA a décidé de s’engager pour une meilleure visibilité des agricultrices, afin que leur travail et la place qu’elles occupent dans un métier difficile et exigeant soient connus et reconnus de tous.
L’étude “Les femmes dans le monde agricole” a été réalisée par Vérian pour la MSA auprès d’un échantillon de 1020 femmes actives du monde agricole adhérentes de la MSA.
Cette étude s’inscrit dans ce cadre et a été pensée et menée peu de temps avant la mobilisation des agriculteurs commencée le 18 janvier 2024.
Elle permet de dresser un panorama du quotidien des femmes actives du monde agricole objectif, non influencé par une période de tensions. On verra d’ailleurs dans cette étude les signes annonciateurs de la mobilisation commencée juste quelques jours après l’enquête tant le regard que les agricultrices posent sur la politique agricole de la France est négatif.
Qui sont les femmes actives du monde agricole ?
Quel est leur parcours ? Comment ressentent-elles leur place dans le monde de l’agriculture ? Quelles sont leurs motivations, envies et attentes ?
C’est ce à quoi cette étude, appelée à devenir un baromètre annuel, répond.
Des femmes d’expérience aux profils variés
Les femmes actives du monde agricole affichent une expérience solide dans leur secteur : 62% y travaillent depuis au moins 10 ans, dont même 38% depuis plus de 20 ans, 36 % ont entre 35 et 49 ans et 46 % ont entre 50 et 65 ans
On note que les employeuses de main d’oeuvre affichent la plus grande ancienneté dans le secteur : les trois-quarts (74%) y travaillent depuis au moins 10 ans, dont la moitié (48%) depuis plus de 20 ans.
Les agricultrices ne sont pas toutes « femmes de » ou « filles de »
• Seule une sur deux (52 %) a son conjoint qui travaille dans le domaine agricole. Cette proportion varie néanmoins selon le statut : si près de 3/4 (71%) des employeuses de main d’œuvre sont femmes d’agriculteur, ce n’est le cas que d’une cheffe d’exploitation sur deux (55 %) et d’une salariée sur trois (32 %).
• Elles sont également d’origines diverses : 46 % sont issues d’une famille agricole, 30% d’une famille rurale non-agricole et 24 % d’une famille citadine.
A nouveau, cela varie selon le statut : les dirigeantes sont pour moitié issues d’une famille agricole (55 % pour les cheffes d’exploitation et 52 % pour les employeuses de main d’œuvre), alors que cela n’est le cas que d’une salariée sur trois (34%).
• Autre fait marquant : 37 % ont intégré le monde agricole dans le cadre d’une reconversion professionnelle. Quand on voit que cette proportion monte à 44 % parmi les cheffes d’exploitation, cela semble traduire la volonté entrepreneuriale des femmes du monde agricole sans oublier une forme de dynamisme du secteur.
• Les agricultrices travaillent très majoritairement dans la production agricole, à parts quasi égales entre production végétale, culture (41 %) et production animale, élevage (37 %), peu dans la transformation de produits agro-alimentaires (8 %). 6 dirigeantes agricoles sur 10 travaillent aujourd’hui en agriculture conventionnelle, un quart en agriculture biologique ou en conversion bio.
Des profils variés mais un même regard sur leur métier, le monde agricole et la place que les femmes y occupent
L’agriculture est très clairement pour elles un choix de cœur…
Quasiment toutes la décrivent comme un métier « passion » (93 %) qui leur semble de toute évidence essentiel (96 %) et dans lequel elles s’épanouissent (84 %, 92 % même pour les plus jeunes de moins de 35 ans).
Elles sont avant tout mues par leur amour du métier (47 %) et de la nature (51 %). Ces deux raisons sont encore plus souvent mentionnées par les cheffes d’exploitation (respectivement 65 % et 57 %). Les employeuses de main d’œuvre ajoutent également une troisième grande raison, très pragmatique cette fois-ci, pour laquelle elles font ce métier : aider son conjoint agriculteur.
…même si le métier peut s’avérer ingrat.
La très grande majorité juge le métier d’agricultrice à la fois particulièrement difficile (95 %), très peu reconnu (87 % estiment qu’il n’est pas reconnu) et très peu rémunérateur (82 % déclarent qu’il n’est pas rémunérateur).
Il n’est guère étonnant dans ces conditions que malgré leur amour du métier, elles lui attribuent un potentiel d’attractivité limité : 61% estiment que l’agriculture n’est pas un métier attractif.
Ces constats sont partagés par toutes les agricultrices, qu’elles soient dirigeantes ou simples salariées.
Un monde agricole où les inégalités femmes-hommes restent très prégnantes.
Si les trois-quarts des agricultrices (77 %) estiment entretenir de bonnes relations avec les hommes du milieu agricole, elles sont néanmoins 83 % - tous statuts confondus - à y constater des inégalités entre les femmes et les hommes. Un tiers des agricultrices (31%) considère même qu’elles y sont plus fortes que dans les autres secteurs d’activité.
D’ailleurs, leur sentiment de légitimité est fragile : si une courte majorité (61 %) des agricultrices se sentent aussi légitimes que les hommes, près d’une sur deux se sent moins soutenue (41 %), moins reconnue pour la qualité de son travail (42 %), moins acceptée (48 %) et moins respectée (48%) que les hommes.
Dans ces conditions, deux-tiers (66 %) des agricultrices considèrent qu’il est encore plus difficile pour une femme qu’un homme de travailler dans le monde agricole.
Un véritable enjeu de rémunération.
Deux-tiers (66 %) des agricultrices jugent leur rémunération insuffisante, et cette proportion monte même à près des trois quarts (73 %) parmi les cheffes d’exploitation. De fait, pour les agricultrices, le premier levier pour améliorer leurs conditions de travail serait une meilleure rémunération. Un besoin largement partagé par l’ensemble du monde agricole comme l’a montré la récente mobilisation des agriculteurs.
Parallèlement, concilier vie privée et vie professionnelle reste compliqué pour les agricultrices : 41 % ne sont pas satisfaites de leur équilibre vie pro-vie perso, cette proportion montant jusqu’à 52 % parmi les cheffes d’exploitation.
Malgré leur passion pour le métier, un regard morose sur le présent et l’avenir.
Quelques jours avant la mobilisation du monde agricole, les agricultrices font état d’une très grande insatisfaction sur la politique agricole actuelle en France : 9 sur 10 (89 %) s’en déclarent insatisfaites, dont 42 % très insatisfaites.
Et elles craignent d’ailleurs que cela ne s’arrange pas vraiment avec le temps : 80 % portent un regard pessimiste sur l’avenir du secteur.
Dans ces conditions, même si la très grande majorité (81 %) des femmes du monde agricole ont l’intention de travailler dans le secteur jusqu’à leur retraite, leur volonté de transmission est émoussée : seule une sur deux encouragerait ses enfants – garçon comme fille - à y travailler.
