L'information élevage par l'Alliance Pastorale

Nouvelles modalités d'indemnisation des dégâts dus aux grands prédateurs

Le gouvernement vient de publier les textes règlementaires encadrant l’harmonisation des barèmes d’indemnisation des dégâts dus aux grands prédateurs ainsi que les modalités d’application de la conditionnalité de ces indemnisations à la mise en place préalable de mesures de protection.

Suite aux travaux entamés depuis 2016 sur l’harmonisation des barèmes d’indemnisation des troupeaux domestiques quel que soit le prédateur en cause ainsi que sur les modalités d’application de la conditionnalité issues des lignes directrices agricoles dans le régime français, les textes réglementaires consacrant le nouveau dispositif ont été publié au journal officiel du 11 juillet 2019.

Il s’agit du décret n°2019-722 du 9 juillet 2019 relatif à l’indemnisation des dommages causés aux troupeaux domestiques par le loup, l’ours et le lynx. décret n° 2019-722 du 9 juillet 2019.pdf

D’autre part, l’arrêté du 9 juillet pris en application dudit décret vient préciser les modalités techniques d’indemnisation des dégâts dus aux grands prédateurs. Arrêté du 9 juillet 2019 pris pour l'application du décret n° 2019-722.pdf


Constats des dommages

- Les dommages doivent porter sur des animaux d’élevage ou des ruchers

- Le constat est réalisé par un agent de l’ONCFS désigné par le préfet de département via un formulaire type pour apprécier la responsabilité du prédateur. Le décret introduit une nouveauté en accédant à la demande de certains éleveurs (ou leurs mandataires) de pouvoir réaliser les constats par eux-mêmes dès lors que les dégâts portent sur moins de 5 victimes ovines ou caprines. Le préfet coordonnateur du plan relatif au prédateur en cause devra par arrêté autoriser le préfet de département à mettre en oeuvre cette possibilité sur tout ou partie de son territoire.

- En cas d’incertitude sur la responsabilité du prédateur dans les dégâts, le contexte local peut être pris en considération pour accéder à l’indemnisation des troupeaux

- L’étouffement et le dérochement sont assimilés à de la prédation


Conditions d’indemnisation des dégâts dus aux troupeaux par les grands prédateurs

- L’éleveur doit être propriétaire ou détenteur des animaux au moment de la prédation. Pour le cas particulier des groupements pastoraux, le gérant reçoit l’indemnisation qu’il répartir ensuite entre les différents propriétaires concernés.

- Les agriculteurs qui prétendent à l’indemnisation devront respecter la conditionnalité pour être indemnisés (voir point suivant)

- Le montant des indemnisations couvre :

 les pertes directes (100% des coûts admissibles) : animaux morts ou à euthanasier, valeur des animaux disparus non tenus en parcs clos (en parcs clos, l’indemnisation est équivalente à 20% du montant de l’indemnisation des animaux tués)

 les pertes indirectes sous formes forfaitaires : ce sont les pertes consécutives à la perturbation du troupeau (stress, moindre prise de poids, avortements, baisse de lactation), les frais vétérinaires liés à la prédation

 La réparation ou le remplacement des équipements et bâtiments agricoles endommagés (clôtures, parcs, ruchers notamment)

 A titre transitoire (jusqu’au 31 décembre 2020), et seulement pour les dégâts dus à l’ours, une prime de dérangement forfaitaire de 160 € est versée

- Les montants d’indemnisation figurant dans les barèmes sont majorés pour les animaux dont la production est valorisée (inscription dans un organisme génétique, sous mention valorisante – voir tableau ci- après concernant le barème des ovins).

- Les montants d’indemnisation sont révisés tous les 3 ans.

NB :

- Pour un animal labellisé ou inscrit : +10%

- Pour un animal biologique ou vendu en circuit court : +20%

- Les deux majorations sont cumulables pour les ovins.


Conditionnalité des indemnisations

Les lignes directrices agricoles de 2014 (LDA) considèrent les indemnisations comme des aides d’Etat et donc nécessitent une contrepartie minimale de la part des éleveurs pour être valables au regard de la réglementation européenne. Cette analyse a été contestée par la FNO et le CAF loup, à l’appui d’un argumentaire juridique qui n’a toujours pas été prise en compte par le ministère de la transition écologique et solidaire, en charge du versement des indemnisations dues à la prédation.

Ainsi, pour être indemnisé suite à des attaques de grands prédateurs l’éleveur doit mettre en place des mesures de protection sur ses troupeaux et/ruchers.

Les modalités d’application de la conditionnalité sont différentes selon les troupeaux domestiques prédatés, la fréquence des attaques, les territoires de prédation et le type de prédateur concerné :

- Dans les cercles 1, les éleveurs d’ovins et de caprins victimes du loup doivent mettre en place « des mesures préventives raisonnables de protection des troupeaux prévues par l’arrêté ou des mesures jugées équivalentes par la DDT ». A noter que la souscription d’un contrat FEADER de protection suffit à considérer que la conditionnalité est respectée par l’éleveur (sauf preuves de carence importantes détenues par l’administration).

- La conditionnalité n’est pas appliquée :

 aux éleveurs reconnus individuellement non protégeables, après confirmation via une analyse technico-économique réalisée par la DDT et soumis à l’avis du préfet coordonnateur du prédateur concerné

 si le troupeau a subi moins de 3 attaques au cours des 12 derniers mois

 pour les éleveurs situés en zones non protégeables telles que délimitées par arrêté du préfet coordonnateur du plan loup

 dans les cercles 2 (zones de présence probable du loup)

- Pour le cas de l’ours, la conditionnalité requise en cercle 1 pour les ovins et caprins victimes du loup s’applique dans 2 ans.

- Pour le cas du lynx, la conditionnalité est requise à compter de la 5ème attaque sur une période de 2 ans


La FNO continue de s’opposer à la gestion différenciée entre les éleveurs et les territoires dans la politique des grands prédateurs en France.

Gestion administrative unifiée des dossiers d’indemnisation pour les trois prédateurs


L’instruction des dossiers sera assurée via un traitement automatisé d’informations nominatives dénommé « Géoloup ».

L’Agence de services des paiements (ASP) sera en charge des paiements des montants d’indemnisation, dès juillet 2019 pour les dégâts dus au loup et au lynx et à partir du 1er janvier 2020 pour les dommages attribués à l’ours.


Image d'illustration par Sarah Richter de Pixabay  


 - Image parSarah Richter de Pixabay