Comment allaiter les chevreaux ?

Le choix de la technique d’allaitement doit être réfléchi par rapport à la protection sanitaire induite ou non, au coût, au travail engendré et aux souhaits propres à chaque éleveur.


Le temps de travail varie du simple au double et le coût du simple au triple entre les différentes modalités. La protection sanitaire peut être totale, à condition de respecter les préconisations (thermisation du lactosérum, séparation immédiate mère - chevreaux…) et l’hygiène de base ou bien mauvaise selon les techniques.

Comment allaiter les chevreaux ?

Selon les travaux de Cap’Pradel, la croissance des jeunes est satisfaisante quelle que soit la technique utilisée, avec un bémol pour le lait de vache acidifié du fait du manque de références. 


Un tableau comparatif (voir pages suivantes) a été conçu pour faciliter le choix entre les différentes techniques d’allaitement (aliment d’allaitement, lait maternel brut, lait maternel acidifié, lait maternel thermisé et lait de vache acidifié) sur les critères de la protection sanitaire, du temps de travail et du coût.


La phase d’allaitement joue un rôle déterminant sur le gabarit et la production laitière ultérieure de la chevrette. Il est important de mettre en oeuvre les éléments optimisant l’alimentation et prévenant les problèmes sanitaires pour obtenir une croissance supérieur à 180 g/jour.


Allaitement 

Cette phase commence après les deux premiers repas au colostrum - donc dès le troisième - jusqu’au sevrage vers 50 jours. Le lait représente la majorité de la ration mais du foin et des concentrés doivent être mis à disposition pour habituer les jeunes à les consommer.


Phase colostrale 

7 premiers jours de lactation de la chèvre, lorsque le lait n’est pas encore commercialisable.

Chacune des techniques présentées peut être utilisée en agriculture biologique, à condition que le produit de base soit certifié AB. Si ce n’est pas le cas, son utilisation peut nécessiter une dérogation.


Matériel de distribution

Il est conseillé de privilégier la tété (multi-biberon, allaiteur automatique) plutôt que la buvée (seau, gouttière...).


En effet, le fait de téter oblige le jeune caprin à lever la tête donc la gouttière oesophagienne se referme empêchant le lait de passer dans le rumen et le réseau.


Distribution manuelle

La technique est simple, peu coûteuse en matériel mais chronophage. Elle est plutôt adaptée aux petits troupeaux. Dans cet article le terme multi-biberon sera employé pour évoquer la distribution manuelle


Distribution automatique 

Les allaiteurs (louves) sont adaptés à tout type de lots de chevrettes mais représentent un investissement conséquent. Des modèles existent pour distribuer le lait reconstitué ou du lait maternel, à la demande et à la température souhaitée.



Nettoyage du matériel

  • Les multi-biberons et les distributeurs automatiques de lait doivent être nettoyés à l’eau chaude une fois par jour.
  • Les tétines peuvent être les vecteurs de germes de l’environnement comme les colibacilles responsables de diarrhées. Il est important de veiller à une bonne hygiène. Il est conseillé de les nettoyer également à l’eau chaude 1 fois par jour.

 

Conseils sur l’allaitement

  • Vérifier l’ingestion du repas (palpation abdominale, animaux à l’écart...). Une surveillance accrue est nécessaire au démarrage de la phase d’allaitement.
  • Quel que soit le mode de distribution (par repas ou en continu), distribuer le lait à volonté car la croissance est directement liée aux quantités ingérées.
  • Préparation au sevrage : mettre à disposition des fourrages et concentrés ingestibles par les cabris.

La quantité de lait distribuée pourra être limitée à 2 litres/jour de buvée pour un sevrage brutal, ou pour un sevrage progressif, la quantité ainsi que le nombre de repas par jour seront diminués à partir de 6-7 semaines.

Le choix de la technique d’allaitement doit être réfléchi par rapport à la protection sanitaire induite ou non, au coût, au travail engendré et aux souhaits de l’éleveur (par ex : utilisation du lait maternel).
Toutes les modalités testées sont autorisées en Agriculture Biologique sous condition et présentent des résultats zootechniques corrects.
Les investissements matériels (par ex : allaiteur automatique) doivent être envisagés par rapport au temps économisé : en incluant le temps de travail dans le coût de l’allaitement, ils peuvent être rentables même pour des petits effectifs de chevreaux. Le niveau de protection sanitaire permis par une technique est primordial dans la prise de décision. Même si un troupeau neprésente pas de signes cliniques depuis plusieurs années, il peut être porteur de pathologies qui risquent d’être transmises aux jeunes caprins via le lait avec des conséquences dramatiques si aucune mesure de prévention n’est prise (thermisation du lait maternel ou utilisation de lait de vache ou d’aliment d’allaitement).


Allaiter  avec le lait thermisé


Le lait maternel thermisé est une technique très peu utilisée  pour nourrir ses jeunes sur l’ensemble de la phase lactée. Par rapport aux autres techniques valorisant le lait maternel, elle a l’avantage de prévenir l’apparition de certains  agents pathogènes, à condition d’être rigoureux sur la gestion de la thermisation.


Trois dispositifs de thermisation ont été testés à la ferme expérimentale du Pradel, du plus basique au plus automatisé : Le stérilisateur à bocaux, le stéricolostrum et le pasteurisateur double emploi (élevage et fromagerie). Ils ont la même fonction mais leur praticité et leur coût varient. D’autres dispositifs existent et peuvent également répondre à vos besoins.

  • STÉRILISATEUR À BOCAUX

Stérilisateur à bocaux ménager électrique, accompagné:

- D’un récipient pour le lait, à mettre dans le stérilisateur afin de créer un bain-marie. Son volume doit être adapté au stérilisateur

- D’une sonde permettant de réguler la température du lait dans le bain-marie à 56 °C. Ce dispositif supplémentaire permet un réglage plus précis que la température indiquée sur le stérilisateur

Volume : 18 à 25 litres en fonction du modèle.


  • STÉRICOLOSTRUM

Il a été conçu pour thermiser le colostrum et peut être utilisé pour le lait d’allaitement. Il est équipé d’un lecteur qui permet de visualiser la durée d’un cycle à 56 °C. Il est très précis car équipé d’un thermostat électronique.

Volume : 15 L

  • PASTEURISATEUR Double emploi (Élevage et fromagerie)

Cet appareil peut être utilisé en élevage puis en fromagerie pour pouvoir pasteuriser du lait en vue de fabriquer différents produits laitiers après le sevrage des jeunes. Cette double utilisation permet une économie d’investissement. Tout comme les deux premiers dispositifs, le pasteurisateur «double emploi» chauffe le lait en bain-marie. 


Méthode de thermisation du lait

• Chauffer le lait pendant 1 heure à 56 °C rapidement après la traite.

• Distribuer le lait 2 fois par jour à environ 25 °C à l’aide de multi-biberons.

• Il est possible de faire une seule thermisation dans la journée puis de stocker le lait au réfrigérateur (4 °C - 6°C). Avant de le distribuer, le lait peut être réchauffé au bain-marie, jusqu’à 25 °C environ.

• Le chauffage et la distribution peuvent être combinés et automatisés sur un même matériel: des modèles (ex: taxi-lait) existent pour à la fois chauffer, refroidir et distribuer le lait. Le travail est facilité par une traction motorisée de l’ensemble.


Conseils pratiques :

- Nettoyer la cuve contenant le lait après chaque utilisation et le bain-marie tous les 5 jours environ.

- L’eau utilisée pour le refroidissement peut être valorisée pour l’eau d’abreuvement des chèvres : ceci évite le gaspillage et permet de fournir de l’eau tiède en hiver pour les troupeaux saisonnés.

Allaiter avec du lait maternel acidifié

Cette technique développée en élevage ovin laitier présente certains avantages en élevage caprin, notamment en termes d’organisation et de temps de travail. Mais elle n’est pas efficace pour empêcher la transmission du CAEV et des mycoplasme.

Le matériel d’acidification est simple. Il suffit à minima d’une cuve et d’outils de mesure du pH.

Le volume de la cuve varie en fonction du nombre de jeunes élevés. Pour la dimensionner, compter une consommation maximale de lait à 2,5 L lait / jour / chevreau (quantité à adapter d’un jour sur l’autre) + 20 % pour la prise en compte du pied de cuve.

La cuve

• Fabriquer sa cuve : fixer une cuve ou un récipient sur pieds. Installer un robinet (très pratique) sur la cuve.

• Acheter sa cuve : des cuves en inox ou autres matériaux sont disponibles dans le commerce mais coûteront un peu plus cher.


L’agitation

Elle peut se faire avec une louche, de façon énergique ou à l’aide d’un agitateur électrique.


Contrôle de l’acidification

Il est important de vérifier le pH du lait après 24 h d’acidification. Pour cela il est possible d’utiliser :

•    Un pH-mètre électronique (précision à 0,1 ) fiable et étalonné

•    Un  rouleau  papier pH  deux zones (précision 0.3), moins fiable mais peut être suffisant pour les personnes initiées à la distribution de lait acidifié.

Distribution

Un multi-biberon peut être acheté (type milk-bar) ou auto-construit.


Méthode d’acidification

Avant la période d’allaitement, fabriquer un pied de cuve.

Exemple à adapter en fonction de la quantité voulue :

Un pied de cuve d’1 litre permettra d’ensemencer 4 litres de lait.

• Ensemencer 1 L de lait cru avec 2 yaourts du commerce ;

• Laisser reposer 24 à 48 h dans un local à une température entre 15 et 20°C ;

• Le pied de cuve est prêt à ensemencer du lait brut.


Ensemencer le lait quotidiennement

• La veille du premier jour d’allaitement, ensemencer du lait brut de traite du matin ou de la veille avec du pied de cuve à une dose de 20%.

• Laisser reposer 24 h clans un local à une température entre 15 et 20°C.

• Le lendemain le pH du lait acidifié doit être entre 4,4 et 5 pour être distribué.

« Avant de distribuer le lait, conserver une partie du lait acidifié afin de réensemencer à nouveau du lait brut dans la matinée.


Conseils pratiques

- Anticiper la fabrication de lait acidifié : avoir accès à un local chauffé à 15°C - 20 °C afin d’avoir une acidification optimale tout au long de l’allaitement

- Conserver un pied de cuve prêt au congélateur par sécurité, pour la saison d’allaitement mais également d’une année sur l’autre

(un pied de cuve pourra être réalisé en fin de lactation pour réduire la durée de conservation au congélateur qui doit être inférieure à 6 mois).

Allaiter avec du lait acidifié de vache

Possibilité envisagée pour les exploitations mixtes ou celles qui ont un proche voisin possédant des bovins laitiers. L’acidification permet d’améliorer la digestibilité de ce lait non maternel

Allaiter avec un aliment d’allaitement

L’aliment d’allaitement est élaboré à partir de la dilution de poudre du commerce dans de l’eau. Différents types de poudres existent sur le marché dont certaines certifiées en agriculture biologique, compatible avec la distribution automatique. Cette méthode est adaptée à tout type de troupeau et garantit la protection sanitaire à condition d’être rigoureux sur l’hygiène.



Concentration en poudre : suivre les indications des fabricants


Pour la distribution manuelle, respecter les recommandations du fabriquant en étant vigilant sur les unités. En effet, les consignes de dilution sont exprimées soit en «g / L d’eau» soit en «g / L de buvée».

Dans le premier cas, le plus simple, il suffit de peser la poudre et mesurer un volume d’eau puis de mélanger le tout.

Dans le deuxième cas, après avoir pesé la poudre, la mélanger avec environ la moitié du volume souhaité puis compléter avec de l’eau jusqu’à ce volume. Le matériel doit être lavé après chaque utilisation.


Exemple de rationnement pour une chevrette d’élevage

-    Chevrette d’élevage : 175 g additionné à 1 litre d’eau avec un lait à 24 % de M.G. et M.P soit une concentration de 150 g / L de buvée. 

200 g pour 1 L d’eau pour les chevreaux en boucherie


Distribution manuelle : 

• Mélanger dans un récipient l’eau chauffée à 40 - 45 °C et la poudre.

• Distribuer dans un multi-biberon.

• Privilégier le lait avec PLE ou distribuer moins d’1 L par repas.


D’après le programme PEITALC - Cap’Pradel