- Par Thierry Duclairoir
Les zoonoses dues aux parasites internes du chien
Une campagne de sensibilisation a été menée cette année dans les cabinets médicaux et les cabinets et cliniques vétérinaires pour rappeler le risque de transmission du chien à ses maîtres de larves de parasites (Ascaris et Ténia) responsables de pathologies parfois graves, notamment chez l’enfant, et pour insister sur une vermifugation régulière des animaux de compagnie.
L’ASCARIDIOSE
Elle est due à Toxocara canis, ascaris le plus fréquent du chien, qui est susceptible d’entraîner des «larva migrans» chez l’homme.
Ce vers rond de grande taille (10 à 20 cm) possède un cycle de développement en 2 phases :
- une phase exogène : dans le milieu extérieur où il y a embryonnement de l’œuf et dissémination par différents hôtes de transport ; les œufs sont très résistants dans le milieu extérieur (jusqu’à 3 ans).
- une phase endogène : le chien se contamine en ingérant des œufs embryonnés (présents dans le milieu extérieur, suite à la consommation d’aliments peu cuits ou de rongeurs infestés) qui se transforment en larves ; celles-ci migrent dans l’organisme du chien, peuvent s’enkyster dans les muscles notamment. A certaines périodes ces larves se développent en adultes dans l’intestin ; elles peuvent migrer par le placenta et par le lait ce qui explique l’infestation des chiots dès leur naissance. Ce sont donc les chiennes en gestation et les jeunes chiots qui sont les sources majeures de parasites. Ce parasitisme est en général bien toléré par la femelle, mais il peut être dangereux pour le jeune lors d’infestation massive avec des symptômes essentiellement digestifs (abdomen distendu, diarrhée) mais aussi éventuellement respiratoires. Le chien contamine le milieu extérieur en disséminant des œufs d’Ascaris avec ses excréments.
L’homme s’infeste en ingérant des œufs embryonnés par l’intermédiaire de végétaux souillés, de terre ou de sable (enfants dans les bacs à sable), ou tout simplement en caressant son chien, ou encore en ingérant des aliments peu cuits contenant des larves. Ces œufs libèrent des larves qui en migrant dans l’organisme humain sont responsables du syndrome «larva migrans”. La migration larvaire peut affecter le foie, la rate, la cavité abdominale, le poumon, l’œil ou l’encéphale et provoquer de graves maladies avec d’importantes séquelles.
La prophylaxie est tout d’abord sanitaire, c’est à dire hygiénique notamment en interdisant l’accès des chiens aux aires de jeux des enfants. D’autre part on évitera de nourrir les chiens avec des aliments crus ou insuffisamment cuits.
La prophylaxie médicale fait appel à la vermifugation des chiens à des périodes précises :
- Les chiots seront traités dès leur 15ème jour de vie, puis tous les 15 jours jusqu’à 2 semaines après le sevrage, et enfin tous les mois jusqu’à l’âge de 6 mois.
- les chiennes reproductrices seront traitées au moment des chaleurs, de la saillie, en fin de gestation puis en même temps que le premier traitement de leur portée car elles sont potentiellement infestées.
- Les chiens adultes seront idéalement traités 4 fois par an ; le rythme pourra être augmenté dans des situations à risque comme celle d’un animal ayant accès à des jardins et parcs et vivant dans une famille avec de jeunes enfants.
De nombreux vermifuges actifs contre les Ascaris sont disponibles sur le marché (comprimés, solution orale, pâte orale, spot-on).
NB : le chat aussi peut être infesté par un ascaris (Toxocara cati) qui est également transmissible à l’homme, d’où les mêmes préconisations de vermifugation que pour le chien.
L’ÉCHINOCOCCOSE
Cette maladie chez l’homme est due à la larve d’Echinococcus granulosus qui est un ténia du chien.
Le chien héberge dans son intestin les ténias adultes (souvent en grand nombre) dont chacun élimine régulièrement un segment contenant plusieurs centaines d’œufs. Ces œufs directement infestants peuvent résister dans le milieu extérieur plusieurs mois et sont ingérés par un mouton (éventuellement un bovin) dans lequel ils se transforment en larves hydatiques volumineuses (sortes de kystes) qui se fixent sur le foie ou dans les poumons. Le chien se réinfestera donc en mangeant des abats de mouton.
L’homme peut se contaminer par l’ingestion d’œufs échinocoques présents sur le pelage du chien ou dans le milieu (végétaux souillés, eau …). Ces œufs évolueront pour former des larves ou kystes hydatiques responsables de la maladie du kyste hydatique. Ces kystes peuvent mettre plusieurs années à produire des signes cliniques qui seront fonction de leur localisation (foie, poumons …) et de la pression qu’ils exercent sur cet organe. Le traitement est uniquement chirurgical.
Le chien peut aussi transmettre une autre échinococcose due à Echinococcus multilocularis, l’échinococcose alvéolaire. Mais c’est surtout le renard qui est responsable de la contamination humaine en souillant par ses déjections les végétaux et fruits sauvages (airelles, fraises des bois…). Le renard et donc éventuellement le chien s’infestent en mangeant des petits rongeurs (campagnols).
La prophylaxie de l’échinococcose est d’abord sanitaire, c’est à dire une bonne hygiène générale : bien laver les légumes, éviter de donner des abats de mouton aux chiens, se laver les mains après avoir donné des soins aux chiens.
La prophylaxie est aussi médicale, c’est à dire la vermifugation régulière des chiens de berger, la molécule la plus efficace étant le praziquantel. Tout chien qui part à destination du Royaume Uni, de Malte, de l’Irlande, de la Norvège et de la Finlande doit être traité contre cette infestation avant le départ.
Note en plus
Cysticercus ténuicollis larve d’un autre ténia du chien (Tænia hydatigena) est à l’origine de lésions du foie chez le mouton avec présence de “boules d’eau” appendues au péritoine et au foie entraînant des saisies à l’abattoir.
La prévention passe par la vermifugation régulière des chiens de troupeau et la destruction des abats de mouton parasités.