- Par AP
Maïs fourrage - Comment préserver toute la richesse de la plante ?
Si la technique de l’ensilage était déjà décrite à la fin du 19ème siècle, le maïs fourrage ne s’est développé qu’à partir des années 1970 avec l’arrivée sur le marché de variétés précoces.
Depuis plus de dix ans, les surfaces de maïs fourrage sont relativement stables et couvrent environ 1,4 millions d’hectares.
Le maïs fourrage est la base de l’alimentation hivernale des troupeaux laitiers, et est également utilisé en complément du pâturage en été et à l’automne.
Le maïs fourrage est cultivé dans toutes les régions françaises (à l’exception de l’extrême Sud-Est) et parfois jusqu’à plus de 900 m d’altitude. Sa régularité de rendement et de qualité, sa valeur énergétique élevée, la simplicité de culture et de conservation expliquent ce succès.
Depuis les années 80, l’INRA et les entreprises de sélection poursuivent une sélection spécifique, prenant en compte le critère «valeur alimentaire pour la production laitière».
Bien connaître la plante pour exploiter ses richesses
Que la récolte du maïs soit faite en grain ou en fourrage, le développement de la plante est le même, seul le stade de récolte diffère. Cependant, L’intérêt pour la partie «tige + feuilles» et pour la composition chimique globale de la plante est plus important en production de fourrage qu’en production de grain. Le cycle de développement du maïs est bref et intense. Le cycle de végétation d’un maïs à destination de fourrage dure de 5 à 6 mois. Les rendements plante entière au stade 32 % MS varient de 10 à plus de 20 tMS/ha.
Toute La partie aérienne de la plante participe au rendement, à la valeur alimentaire, à La conservation et en définitive à l’alimentation de l’animal. Le rendement n’est donc pas le seul critère. La maîtrise du taux de MS à la récolte est importante tant pour la conservation que pour la composition chimique et participe à la valeur alimentaire du fourrage. Le choix du stade de récolte conditionne la valorisation par l’animal (voir tableau ci-contre).
Après la floraison, le rendement plante entière suit l’augmentation du rendement grain. Tant que l’offre climatique et la qualité de la surface foliaire (surface verte, efficace pour La photosynthèse) de la plante le permettent, le rendement progresse. En règle générale, le rendement plante entière est à son maximum à 35 % MS plante entière. A partir de fin septembre - début octobre, les conditions climatiques ne permettent plus une photosynthèse efficace, le rendement se stabilise.
Le taux de MS plante entière est piloté par le rendement et la maturité du grain qui évoluent rapidement. La teneur en matière sèche de la partie «tige + feuilles» évolue peu et est tributaire des conditions d’alimentation hydrique de la plante.
La teneur en amidon de la plante entière passe en moins de deux mois de quelques pourcents trois semaines après La floraison, à environ 30 % de la MS à maturité fourrage. Parce que l’absorption d’azote par la plante est limitée après la fécondation, la teneur en M.A.T. (Matières Azotées Totales) dans la plante évolue par dilution. La valeur énergétique, exprimée en UFL, est relativement stable entre 28 et 35 % MS plante entière. Au-delà de 37 % MS, la valeur énergétique peut baisser à cause de La diminution de qualité des tiges et feuilles.
Le progrès génétique
Comme en maïs grain, le progrès génétique existe en maïs fourrage. Il est de l’ordre de +1% en rendement par an (+150 kg MS/ha par an), plus important dans les groupes les plus précoces.
Le progrès génétique se mesure aussi par une plus grande régularité de rendement en conditions difficiles de végétation. Les variétés d’aujourd’hui sont plus rustiques car elles sont plus régulières. Ce progrès peut s’expliquer par une durée plus longue du fonctionnement de l’appareil végétatif et par une meilleure tenue de tige.
Le progrès génétique concerne également la valeur énergétique, principalement en lien avec l’amélioration de la digestibilité de la partie tige + feuilles. Depuis 1998, un critère de valeur alimentaire est pris en compte pour l’inscription des variétés au catalogue : la valeur énergétique UFL/kgMS.
Récolter au bon stade
La récolte est une étape importante pour que la quantité et la qualité du maïs fourrage, élaborées au champ, arrivent sans déperdition dans l’auge de l’animal. Le respect des bonnes pratiques est une garantie de réussite. Stabilisé, le fourrage peut se conserver pendant plus de 12 mois.
Le stade de récolte détermine le rendement, le taux de MS et la composition chimique de la plante récoltée. L’objectif est une récolte entre 30 et 35 % MS. Le stade de récolte est un compromis entre la teneur en grains et la qualité des tiges. Plus le stade de la plante à la récolte est avancé, plus des difficultés peuvent apparaître : difficulté de conservation quand la teneur en matière sèche dépasse 35 %, difficulté de digestion des grains trop secs et difficulté de digestion des rations trop riches en amidon.
Pour définir la date optimale de récolte, ARVALIS -Institut du végétal a mis au point une méthode se basant sur l’observation du remplissage des grains. Cette méthode a été remise à jour en 2011 pour tenir compte de l’évolution de la génétique variétale et aussi parce qu’on sait mieux mesurer l’incidence des conditions de végétation sur l’état de l’appareil végétatif.
L’amidon dans les grains est présent sous trois formes : amidon laiteux, amidon pâteux, amidon vitreux. La répartition de ces trois formes renseigne sur l’état de maturité des plantes. L’impact de l’état de l’appareil végétatif reste modéré. Au stade optimal de récolte, ces trois amidons sont répartis en trois tiers dans les grains des couronnes centrales des épis (voir schéma page suivante).
Effectuer la récolte au bon moment, soit environ 32 % de matière sèche, est indispensable pour préserver la qualité nutritionnelle du maïs ensilage.
Conserver sans rien perdre
La finesse de hachage a deux objectifs apparemment contradictoires : hacher fin pour faciliter Le tassement du silo et laisser des brins assez Longs pour la mastication des vaches. Les gros morceaux plus de 20 mm) sont indésirables, ils ne doivent pas dépasser 1% du volume. Ils traduisent un défaut le réglage de l’ensileuse, gênent le tassement et provoquent des refus à l’auge. A l’inverse, hacher trop fin entraîne une baisse d’efficacité de la ration. L’amidon vitreux des maïs à plus de 32 % MS a besoin d’être fractionné pour que sa digestion soit optimisée : c’est le rôle des éclateurs de grains disponibles sur La plupart des machines.
Pour limiter Les apports de terre dans Le fourrage, préférer Les silos en sol bétonné, Les zones de circulation proches du silo en terrain stabilisé (empierrement, sols goudronnés,...).
L’absence d’oxygène dans le silo est nécessaire pour que les fermentations se déroulent bien. Le tassement doit être efficace. La fermeture du silo a pour but de mettre le fourrage à L’abri de l’air du premier au dernier jour. La fermeture du silo se fait le jour de la récolte et doit être la plus hermétique possible, grâce à une bâche plastique, bien posée et bien protégée.
Dans le silo de maïs fourrage, les pertes interviennent surtout à l’ouverture, sur le front d’attaque. Une des conditions à respecter pour limiter les pertes consiste à avancer le front du silo plus vite que la reprise des fermentations. On retient généralement Les valeurs d’avancement de 10 cm par jour en hiver, de 20 cm par jour en été.
Enfin, lors de la récolte, ne pas oublier de prendre des échantillons de fourrage frais pour faire des analyses de composition chimique et de valeur alimentaire qui permettront de construire des rations équilibrées.
L’ensilage
L’ensilage est une méthode naturelle de conservation des fourrages à la ferme, mettant en oeuvre des bactéries lactiques qui transforment, en milieu humide, en absence d’oxygène, des glucides solubles en acide lactique. L’abaissement du pH empêche l’activité néfaste d’autres microorganismes, tant que l’anaérobiose est maintenue. La composition du maïs est particulièrement favorable au bon déroulement de l’ensilage : la teneur en matière sèche est en général assez élevée pour éviter l’écoulement de jus, la teneur en sucres du maïs est toujours suffisante pour mener à bien les fermentations lactiques, le pouvoir tampon du maïs est faible. La quantité d’acide lactique nécessaire à la stabilisation du silo (pH inférieur à 4) est relativement faible (3 à 4 fois moins que pour l’ensilage d’herbe ressuyée). Les pertes sont relativement faibles, de l’ordre de 10 % de la matière sèche stockée, essentiellement sur le front d’attaque et par des refus à l’auge.
Des rations équilibrées pour les bovins
Le maïs fourrage est avant tout une source d’énergie pour les bovins. Dans une ration pour vache laitière, il peut apporter jusqu’à 80 % de l’énergie nécessaire à l’entretien et à la production. Le maïs fourrage n’est jamais distribué seul aux vaches laitières, parce qu’il est déficitaire en protéines, en minéraux et en vitamines. Pour être bien valorisé, il doit donc au minimum être associé à un correcteur azoté, minéral et vitaminique de manière à couvrir les besoins de production et assurer un bon fonctionnement digestif. La ration des vaches laitières doit en même temps être appétante, pour que l’ingestion d’éléments nutritifs couvre les besoins, et assurer un bon fonctionnement digestif. Il faut donc veiller à La qualité «hygiénique» de la ration, c’est-à-dire à sa capacité à être bien digérée, sans perturber l’équilibre microbien du rumen.
Autrement dit, la ration doit avoir une «fibrosité» suffisante ; en pratique, nous avons mis en évidence qu’une bonne ration pour vache laitière contient entre 22 et 28 % d’amidon. On devra donc éventuellement associer au maïs une source de fibres (fourrage ou concentré) de façon à respecter la teneur en amidon. 22 % d’amidon dans la ration permet une bonne digestion des fibres végétales dans le rumen. Mais l’ingestion peut être limitée par l’encombrement des fourrages. Ce type de ration convient pour les niveaux de production faibles et moyens. Au-delà de 28 % d’amidon dans la ration, des signes avant-coureurs de l’acidose peuvent apparaître. Concernant les jeunes bovins, l’ensilage de maïs, associé à une céréale et à un correcteur azoté, a été la base du développement de l’engraissement depuis des décennies. On peut dire que la vitesse de croissance moyenne sur la période d’engraissement d’animaux de race à viande varie proportionnellement à la densité énergétique des rations. C’est pourquoi, une bonne ration pour bovins à l’engraissement peut contenir jusqu’à 38 % d’amidon.
Sources : Arvalis, Gnis, UFS (Union Française des Semences), Maizeurop